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Axelle Despiegeleare
Mode

L'Oréal engage "la plus belle supportrice du Mondial"

By Etienne Bennequin
11/07/2014

Vous, là, qui avez suivi la Coupe du Monde depuis votre télé toute neuve et avec assiduité, faites-vous partie de toutes ces mauvaises langues qui dénoncent la tendance prononcée de la Fifa à diffuser très régulièrement de brèves images de supporters, ou plutôt de supportrices, disons « triées sur le volet » ? Vous imaginiez bien le cadreur/voyeur passant son temps à zoomer avec sa grosse caméra sur les plus jolies filles dans le stade. Vous avez tort. Cet homme ou cette femme fabrique des destinées.

Vous avez bien sûr entendu parler d’Axelle Despiegelaere, jeune supportrice Belge et plus célèbre victime du voyeurisme inhérent à cette Coupe du Monde. Suite à sa brève apparition sur les écrans du monde entier lors du match Belgique-Russie, elle a été décrétée « plus belle supportrice du Mondial », a vu plusieurs pages Facebook créées à son nom pour un total de 300 000 fans, et a du décliner de nombreuses demandes en mariage – la jeune fille est encore mineure, donc s’il peut exister un débat sur la moralité d’en faire un sex-symbol, il n’y en a pas sur la légalité de lui passer la bague au doigt.

Le phénomène est intéressant, parce qu'il repousse les limites du concept de buzz hors du domaine de l'action. Axelle Despiegelaere n'est évidemment pas la première à faire le tour du monde malgré elle, mais elle est la première à n'avoir rien fait. Elle n'a pas prononcé un mot ni réalisé la moindre action : elle s'est contentée d'exister. Elle n'était même surement pas la plus jolie fille dans le stade - 73 531 spectateurs au Maracana - et je peux affirmer avec quasi-certitude que si j'avais pris une photo d'elle dans la rue puis publié cette photo sur les réseaux sociaux, rien ne se serait passé. Quelques secondes d'apparition à l'écran dans un programme regardé par des millions d'individus déjà conditionnés par des images de jolies supportrices depuis le début de la compétition ont généré de l'activité sur Facebook et Twitter - les hashtags #sexy et #hot ont connu un pic le jour du match Belgique-Russie - et de nombreuses autres photos ont circulé. De nombreux médias ont jugé que le phénomène méritait d'être mentionné, l'amplifiant du même coup.

Une popularité naissante qu’elle qualifie elle-même, entre deux gloussements assez mignons, de « buzz éphémère » - on n’osait pas le dire. L’affaire semble pourtant assez sérieuse aux yeux de L’Oréal : le géant français du cosmétique a publié sur Youtube un clip promotionnel mettant en scène la supportrice des Diables Rouges en train de se faire coiffer pendant plus d’une minute.

Notons qu’on assiste ici à quelque chose de tout nouveau chez L'Oréal : leur nouvelle égérie n’a pas grandi pour être modèle, n’a pas écumé les concours de mini-miss étant enfant et n’a pas passé des années à perfectionner sa démarche et son maintien. Elle n’était pas non plus une actrice ou chanteuse célèbre, ou une « femme de », reconvertie dans le domaine de la mode. Elle deviendrait, si la signature d’un contrat est confirmée, un nouveau type de mannequin, apportant à sa marque sourires et fraîcheur plutôt que mystique inaccessibilité – sans compter que Mlle Despiegelaere présente cette caractéristique appréciée chez toutes les célébrités récentes nées sur internet, à savoir qu’elle est connue et pas chère. On voit d’ailleurs bien dans le clip de L’Oréal une intention totalement différente de celle des publicités où Eva Longoria agite sa magnifique chevelure en articulant un « je le vaux bien » aguicheur. La jeune fille ici arrive dans un pull gris comme portent toutes les filles de son âge, sourit, écoute avec attention les explications du coiffeur et s’émerveille de voir ses cheveux aussi beaux.

Et c’est ainsi que le rêve devint réalité pour cette habitante de Tournai, dans la région wallonne de la Belgique. Elle qui, il y a un mois encore, était plongée dans ses bêtes études et la vie monotone qu’ont toutes les jeunes filles de son âge – 17 ans ; j’ai précisé qu’elle était mineure ? -, peut maintenant, grâce aux caméras malicieuses de la Fifa, goûter aux joies de la célébrité. Sélection ces joies sur Youtube : « Faut la baiser ! » s’exclame minimas1, tandis que Mark Stark « s’enverrait bien en l’air avec elle ». D’autres n’en font rien, comme Yorick D’Hoir qui s’indigne : « Quand les putes attirent l’attention … », ou Skrilleks qui ne lui trouve « apparemment rien d’exceptionnel mentalement » - on est certains qu’il possède tous les éléments pour juger de ce genre de choses.

Tout ce que nous souhaitons ici à la si souriante Axelle Despiegelaere, c’est de profiter du mieux qu’elle peut des avantages de sa nouvelle – et peut-être éphémère – situation, d’amasser un peu d’argent pour ses études, ou de continuer dans la mode si elle aime ça. Et puis d’apprécier, entre les commentaires désobligeants des grossiers malsains et des moralisateurs omniscients, les messages d’amour vraiment touchants que des fans lui envoient par Facebook ou Twitter.

COMMENTAIRES:

17/07/2014 - s.pollock-hill a dit :

An interesting article. Does this mean that Andy Warhol's quote "In the future, everyone will be world-famous for 15 minutes", a modern day version of the Elizabethan phrase "a nine day wonder" is now speeded up to "15 seconds of global TV appearance"?

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